Les floraisons et la vie de la colonie d’abeilles
La particularité du climat méditerranéen et de la végétation qu’il génère est la présence à toute époque de l’année, de végétaux en floraison, même si certaines périodes du calendrier floral présentent une plus importante densité de floraisons.
Les abeilles des colonies sauvages (rares) ou des ruches implantées ont un rythme de développement et une activité en prise directe avec la végétation. Tout décalage ou dysfonctionnement climatique a une répercussion immédiate sur la colonie d’abeilles.
Les floraisons hivernales
Si les gelées hivernales ne sont pas trop rigoureuses, le romarin (Rosmarinus officinalis) dans les garrigues et le diplotaxis (Diplotaxis erucoides) dans les vignes ou les cultures non désherbées, constituent une source de pollen et de nectar – en aliment d’entretien – pour les journées d’hiver ensoleillées qui font sortir les abeilles.
Dès la fin du mois de janvier, les frênes (Fraxinus angustifolia) qui bordent les vignes ou les terrains plus humides, sont le siège d’une intense activité de butinage sur les fleurs discrètes, sans pétales, de cet arbre. Les abeilles en repartent chargées d’un pollen jaune clair qui est une des premières sources importantes – avec l’amandier (Prunus dulcis) qui le suit de peu dans sa floraison- de pollen qui marque le redémarrage de la ponte de la reine et de l’élevage dans la colonie.
En garrigue, le buis (Buxus sempervirens) est également un fournisseur précoce de pollen ainsi que les fleurs blanches du laurier-tin (Viburnum tinus).
Les premières miellées
Le mois de mars est essentiellement le mois du romarin, même si d’autres fleurs sont présentes et visitées par les abeilles. C’est en effet le romarin qui présente à cette époque la plus grande attractivité, en tant que fournisseur de pollen mais surtout de nectar. Lorsque les conditions climatiques sont favorables, une récolte de miel de romarin est possible près du Pic St Loup.
La miellée ne dépend pas en effet uniquement de la présence des fleurs ; selon l’état hydrique de la plante, les montées de nectar dans la fleur se feront plus ou moins abondamment.
Dans des conditions trop sèches, la fourniture de nectar sera réduite. Inversement, en période pluvieuse prolongée, la sortie des abeilles est moins fréquente et la dilution du nectar sucré rend celui-ci peu attractif.
Le pollen est riche en protides (acides aminés) et est donc considéré comme l’aliment bâtisseur indispensable pour la croissance des larves en élevage dans la ruche.
Le nectar est glucidique (glucose, fructose, lévulose …) et constitue la source d’énergie pour les abeilles. C’est seulement le nectar qui, convenablement déshydraté par ventilation, constituera le miel.
Le miel de garrigue
La plus grande activité de la colonie d’abeille correspond bien évidemment, en avril et mai, au maximum de peuplement de la ruche mais aussi au plus grand nombre de plantes en fleurs à ce moment là.
C’est l’époque de la floraison du thym (Thymus vulgaris) qui ajoute le plus de typicité au goût du miel des garrigues, suivi du dorycnium(Dorycnium pentaphyllum), petite fabacée blanche, connue sous le nom de badasse et qui fournit un nectar abondant car sa floraison est relativement prolongée.
Pendant cette période printanière, les apports significatifs de pollen sont essentiellement dus aux cistes (Cistus monspelliensis et Cistus albidus). S’y ajoutent les plantes rudérales ou adventices des cultures telles que le coquelicot (Papaver rhoeas) au pollen noir ou le crépis (Crepis sancta), petite composée jaune localement très abondante dans les vignes non désherbées.
Les floraisons estivales
La période estivale, marquée par le début de la floraison de la lavande aspic(Lavandula latifolia), ne fournit à la colonie d’abeille que des aliments d’entretien mais rarement de stockage. L’activité de la ruche et la ponte de la reine diminuent en suivant la durée des jours.
Les plantes fleurissant en été sont peu nombreuses ; la fleur représentant un organe de « perte d’eau » pendant cette période de déficit hydrique.
Cependant, l’activité pollinisatrice de l’abeille est effective pendant cette période même si l’importance économique pour l’apiculteur est nulle. Il est cependant possible, des années où le mois de juin a été pluvieux et si juillet n’est pas trop sec, de constater une récolte de miel sur la lavande (Lavandula latifolia) et d’autres plantes telles que le calament (Calamintha nepeta) et la vipérine (Echium vulgare).
Le regain floral de l’automne
Sarriette en septembre
Les premières pluies significatives de l’automne vont déclencher une seconde phase très importante de la vie végétale et donc de la colonie d’abeilles.
Plusieurs végétaux à floraison automnale fournissent, en octobre – novembre, un apport décisif de pollen et de nectar. Pour l’apiculteur, ces miellées garantissent un hivernage des colonies dans de bonnes conditions.
Les abeilles dites d’hiver naissent à ce moment de l’année et leur physiologie, différente dans leur métabolisme lipidique, les prédestine à une vie beaucoup plus longue que celle des ouvrières nées dans l’été.
Euphraise jaune (Odontites luteus)
C’est à ce moment là que fleurissent la sarriette (Satureia montana), la salsepareille (Smilax aspera), l’euphraise jaune (Odontites luteus), le lierre (Hedera helix) ou l’inule (Dittrichia viscosa ou Inula viscosa) dans les lieux incultes.
L’entrée de l’hiver est précédée de la floraison de la bruyère multiflore (Erica multiflora), du romarin qui ça et là reprend, et de l’arbousier (Arbutus unedo) qui épanouit ses clochettes blanches en décembre, en même temps que les arbouses des fleurs de l’année précédente.
Très exceptionnellement, une récolte de miel peut alors être faite mais ce miel d’arbousier, particulièrement amer, a peu d’amateurs et l’important est surtout la fourniture bénéfique de ce nectar tardif à la colonie d’abeilles qui garantit un bon hivernage.
Au nord des Matelles, avant la Figarède, une colline portant le nom « d‘Arboussas » est entièrement couverte d’arbousiers et de salsepareille qui rend d’ailleurs cette forêt quasiment impénétrable.